Les vacances, souvent perçues comme un simple temps de repos ou de divertissement, revêtent en réalité un potentiel bien plus profond.
« Le fait de parcourir à pied plusieurs centaines de kilomètres seul avec soi-même ou en partageant ses pensées avec d’autres] délivre des tourments de la pensée et du désir, ôte toute vanité de l’esprit et toute souffrance du corps, efface la rigide enveloppe qui entoure les choses et les sépare de notre conscience ; il met le moi en résonnance avec la nature. Comme toute initiation, elle pénètre dans l’esprit par le corps et il est difficile de la faire partager à ceux qui n’ont pas fait cette expérience. En partant pour Saint Jacques, je ne cherchais rien et je l’ai trouvé ».
Jean-Christophe Rufin, dans cet extrait tiré d’« Immortelle randonnée », met en lumière cette dimension essentielle : la vacance est un espace de libre choix, d’ennui fécond, de marche, de méditation, d’écoute et de découverte de soi-même. À l’instar du pèlerinage vers Compostelle, les vacances peuvent devenir un chemin spirituel, loin des routines et des impératifs quotidiens.
Prendre du recul, c’est avant tout accepter de suspendre le tumulte de la vie courante pour aller à la rencontre de soi. En cela, Rufin donne à voir combien l’expérience du lâcher-prise, qu’elle se vive sur les 800 km du Camino ou dans le silence d’un après-midi de lecture, peut nous transformer. À l’écart de la société, le voyageur apprend à se dépouiller des vanités, à sentir avec acuité la résonance de son être avec le monde qui l’entoure, à devenir attentif à l’autre comme à soi. Ce détachement, loin d’être une fuite du réel, est en fait une redécouverte de l’essentiel : un temps pour méditer sur ce qui compte vraiment, pour distinguer nos désirs véritables des injonctions imposées.
Cette prise de recul n’exige pas toujours de longues marches ou de grandes aventures. L’important, nous dit Rufin, ce n’est ni le but ni la manière d’y parvenir, mais le processus même du voyage intérieur. Il s’agit d’un état d’ouverture à l’inattendu, d’acceptation de l’imprévu, de disposition à l’écoute de ses besoins profonds. Loin des distractions et de la frénésie, les vacances offrent ce luxe : redevenir humble face au temps, à la nature, à l’ennui parfois. De cette vacance du quotidien, peut naître une vacance de l’âme, où l’on retrouve, dans le silence et la lenteur, la saveur du présent.
Aussi, que l’on soit parti pour une longue randonnée ou que l’on ait simplement pris le temps de sortir de ses habitudes, l’essentiel est d’avoir profité de ce moment pour se retrouver, détaché des conventions et des attentes. En définitive, la qualité des vacances ne se mesure pas à l’exotisme des destinations, mais à la profondeur de ce retour vers soi, à la capacité de reprendre la route – réelle ou intérieure – avec un regard renouvelé sur le monde et sur soi-même.