vendredi 5 février 2010

Traversez le mur !


Non, je ne garde pas les toilettes, je ne fais pas office de point de contrôle et je ne suis pas là parce que je n’ai pas de bureau. J’ai choisi d’être là au contact de tout le monde. Regardez mon univers : il est blanc, sans marques particulières, sans panneau, sans repère. A l’abri de ces cloisons, vous pouvez travaillez en paix. Pendant vos heures de « bureau », hormis les arrivées et départs, le silence règne sur ces couloirs.

Moi aussi, j’ai travaillé derrière ces cloisons : on y est bien au chaud, protégé des regards extérieurs, entre soi. Seulement l’enfer, c’est souvent les autres, comme l’écrivait Jean-Paul (Sartre). Alors, un beau jour, j’en ai eu assez du seul regard de mes collègues et des quelques visiteurs. Je me suis évadée, pas bien loin je l’avoue, juste de l’autre côté du mur. J’y ai tiré mon bureau et ma chaise, fait passer les câbles du téléphone et d’internet sous le panneau et le tour était joué.

Cela vous change la vie. Votre regard se porte au loin, vous voyez les passages de chacun (ce qui ne vous empêche pas de vous concentrer) et surtout vous existez aux yeux des autres. Mes collègues m’ont d’abord regardé comme une folle, puis comme un danger (des fois que cela donnerait l’idée à d’autres d’abattre les cloisons) puis s’y sont résignées.

La direction s’en est émut. J’ai eu aussi la visite des syndicats des représentants du CHSCT, du médecin du travail, … « On » a essayé toutes sortes de manœuvres pour me faire réintégrer mon espace : le risque sur le passage, l’accès pompiers, le déménagement vers un autre endroit… mais j’ai tenu bon. J’ai apporté preuves sur preuves aux arguments qui m’étaient avancées. J’ai aussi bénéficié d’une mésentente entre la direction et les syndicats sur l’indicateur de stress et le harcèlement. Finalement, je suis resté là. je suis mise en avant par la direction pour montrer sa souplesse sur l’intérêt porté aux conditions de travail et par les syndicats comme un combat contre le harcèlement et l’isolement.

En fait, j’ai découvert que j’existais. Moi, ce qui me motive, c’est d’exister, d’entretenir des relations avec les autres et de contribuer à la communauté. Si la vie en Open Space en a tué certains, la vie dans le couloir m’a fait revivre. Fini les froides mesquineries en petits groupes, fini les rivalités sans but qui divisent. Placé comme je suis, je connais presque tout le monde (enfin, tout le monde me connait) ; je deviens un lieu de passage et de croisement, je rends service aux uns et aux autres, sans me laisser déborder.

Finalement ce qui rend heureux, c’est d’avoir une marge d’autonomie, d’être au contact des autres et de se sentir utile. Alors, pour cela, il faut parfois traverser les murs. Ceux-ci peuvent être aussi bien virtuels. Alors, commencez un jour, vous vous ouvrirez de nouveaux horizons et votre voyage de découverte ne fera que commencer.

Un dernier mot : j’ai vu une pub pour un site qui m’a interpellée : http://www.devenezvoumeme.com/. J’ai été un peu surprise, c’était pour l’armée de terre ! Je préfère http://www.trouversavoie.org/., c’est moins engagé….


« Je dois mes succès à la diversité des gens rencontrés plus qu’à mon intelligence » Linus Pauling

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