Bonjour, comment allez-vous ? Comment va la vie ? Un peu essoufflé ? C'est normal, vous venez de grimper neuf étages. Enfin plutôt quatre, parce que pour les cinq premiers, l'ascenseur fonctionne. En tout cas, merci d'avoir fait cet effort pour venir rencontrer un vieux philosophe. Un vieux, j'exagère un peu quand même, parce que j'ai 27 ans. Ici, dans cette maison de retraite, certains ont 40, 70,… voire 300 ans !
Mon nom est Charly. J'en suis content. Je n'aurais pas voulu pour rien au monde m'appeler Charles. C'est un beau prénom, qui signifie "fort, vaillant", mais cela ne va pas pour un philosophe. Les Charles aussi évoquent pour moi les Rois de France. Parmi eux, il y avait des gens biens, mais aussi de drôles de lascars. Regardez leurs surnoms : "le chauve", "le simple", "le bel" ou "le victorieux". Cela veut tout dire. A la limite, je me serais bien vu en Charles le Grand, comme Louis. Il faut que je vous dise que je sors d'une famille nombreuse. Ma mère, peut-être en manque d'inspiration, nous a donné, à mes frères et moi, le même prénom. Mes frères s'appellent tous Charly ! Vous imaginez la situation à la maison. Un numéro ou un surnom aurait été bien utile pour nous distinguer.
Pardon ? Que dites-vous ? Philosophe ? Je vous ai dit que j'étais un philosophe ? Oui, bien sûr, vous en doutez ? C'est l'un de vos congénères qui a dit "on ne peut apprendre la philosophie, on ne peut qu'apprendre à philosopher" (Kant). Moi, depuis ma place, j'écoute, je regarde, je réfléchis. Je suis, vous êtes, nous sommes des philosophes potentiels. Nul besoin de s'appeler Platon ou Aristote pour en faire. Seul compte l'amour de la réflexion, de la remise en question, du questionnement.
Cela vous paraît évident ? Je n'en doute pas. Pourtant la majorité des personnes que je croise ne semble pas prendre beaucoup de temps à cela. Elles sont plus obnubilés par leur course contre le temps (en faire le plus possible dans le moins de temps donné), paraître ("il faut avoir cela", on ne sait pas pourquoi, mais il faut), affirmer ("je sais")…Le philosophe, pour moi, est celui qui écoute plus qu'il ne parle et questionne plus qu'il n'affirme. De toute façon, nombre d'affirmations sont de telles banalités que le silence a plus de valeur. Moi, c'est l'option que j'ai choisi. Et vous ? Savez-vous encore vous arrêter, vous asseoir, regarder, humer, écouter tranquillement ?
Cela sert à quoi la philosophie ? Je vais faire une citation : "Avant, cela servait à accepter notre mort, aujourd'hui, la mort des autres" (Michel Foucault). Le destin de mes frères et plus globalement de mes condisciples me montre tous les jours que je peux dans dix secondes, une heure, trois jours ou 50 ans cesser de plaire, être relégué dans un coin, être oublié, voire disparaître physiquement. C'est votre ami Jean de La Bruyère qui a dit : "Il n'y a pour l'homme que trois évènements : naître, vivre et mourir. Il ne se sent pas naître, il souffre à mourir, et il oublie de vivre". Alors, j'apprécie la vie, la lumière, les rencontres…
Vous voyez, vous êtes pressé de partir ! Courir plus loin, rentrer chez vous…et puis après que ferez-vous de tout le temps que vous aurez gagné à courir toute la journée ? Vous le perdrez en regardant la télévision par exemple. Allez, je ne vous retiens pas, cela m'a fait plaisir de partager ces quelques minutes avec vous. Un dernier mot : si vous croisez un de mes frères, dites-leur bonjour de la part de Charly le philosophe, la chaise du 9ème étage du Musée des Arts Déco à Paris.
Mon nom est Charly. J'en suis content. Je n'aurais pas voulu pour rien au monde m'appeler Charles. C'est un beau prénom, qui signifie "fort, vaillant", mais cela ne va pas pour un philosophe. Les Charles aussi évoquent pour moi les Rois de France. Parmi eux, il y avait des gens biens, mais aussi de drôles de lascars. Regardez leurs surnoms : "le chauve", "le simple", "le bel" ou "le victorieux". Cela veut tout dire. A la limite, je me serais bien vu en Charles le Grand, comme Louis. Il faut que je vous dise que je sors d'une famille nombreuse. Ma mère, peut-être en manque d'inspiration, nous a donné, à mes frères et moi, le même prénom. Mes frères s'appellent tous Charly ! Vous imaginez la situation à la maison. Un numéro ou un surnom aurait été bien utile pour nous distinguer.
Pardon ? Que dites-vous ? Philosophe ? Je vous ai dit que j'étais un philosophe ? Oui, bien sûr, vous en doutez ? C'est l'un de vos congénères qui a dit "on ne peut apprendre la philosophie, on ne peut qu'apprendre à philosopher" (Kant). Moi, depuis ma place, j'écoute, je regarde, je réfléchis. Je suis, vous êtes, nous sommes des philosophes potentiels. Nul besoin de s'appeler Platon ou Aristote pour en faire. Seul compte l'amour de la réflexion, de la remise en question, du questionnement.
Cela vous paraît évident ? Je n'en doute pas. Pourtant la majorité des personnes que je croise ne semble pas prendre beaucoup de temps à cela. Elles sont plus obnubilés par leur course contre le temps (en faire le plus possible dans le moins de temps donné), paraître ("il faut avoir cela", on ne sait pas pourquoi, mais il faut), affirmer ("je sais")…Le philosophe, pour moi, est celui qui écoute plus qu'il ne parle et questionne plus qu'il n'affirme. De toute façon, nombre d'affirmations sont de telles banalités que le silence a plus de valeur. Moi, c'est l'option que j'ai choisi. Et vous ? Savez-vous encore vous arrêter, vous asseoir, regarder, humer, écouter tranquillement ?
Cela sert à quoi la philosophie ? Je vais faire une citation : "Avant, cela servait à accepter notre mort, aujourd'hui, la mort des autres" (Michel Foucault). Le destin de mes frères et plus globalement de mes condisciples me montre tous les jours que je peux dans dix secondes, une heure, trois jours ou 50 ans cesser de plaire, être relégué dans un coin, être oublié, voire disparaître physiquement. C'est votre ami Jean de La Bruyère qui a dit : "Il n'y a pour l'homme que trois évènements : naître, vivre et mourir. Il ne se sent pas naître, il souffre à mourir, et il oublie de vivre". Alors, j'apprécie la vie, la lumière, les rencontres…
Vous voyez, vous êtes pressé de partir ! Courir plus loin, rentrer chez vous…et puis après que ferez-vous de tout le temps que vous aurez gagné à courir toute la journée ? Vous le perdrez en regardant la télévision par exemple. Allez, je ne vous retiens pas, cela m'a fait plaisir de partager ces quelques minutes avec vous. Un dernier mot : si vous croisez un de mes frères, dites-leur bonjour de la part de Charly le philosophe, la chaise du 9ème étage du Musée des Arts Déco à Paris.
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