mardi 26 juillet 2022

Comment Proust a refaçonné Carla



Un roman à lire cet été pour se réinventer


Clara est une jeune coiffeuse dans une petite ville de province. Une vie « normale » et routinière jusqu’au jour où un client oublie un livre dans son salon, et pas n’importe quel livre : « A la recherche du temps perdu » de Marcel Proust. 

Elle connaissait de nom le livre, mais le lire, c’est une autre aventure. Elle va s’y accrocher 

 

« Proust. Avant, ce nom mythique était pour elle comme celui de certaines villes – Capri, Saint-Pétersbourg... – où il était entendu qu’elle ne mettrait jamais les pieds. D’abord, rien. Nada, niente, nichts. Une première phrase aussi connue qu’un slogan publicitaire ou le refrain d’une chanson d’enfant et tout s’obscurcit. Les mots sont des fourmis alignées sous ses yeux. C’est quoi, ce livre ? Elle continue, veut savoir, elle est curieuse, l’a toujours été. Une autre phrase l’arrête. Impénétrable. Elle fronce les sourcils mais continue, sans plus être touchée. Les mots redeviennent des fourmis alignées. Proust parle de la position de son corps dans son lit, de son bras ankylosé, des meubles autour de lui. Écrire autant de mots pour simplement dire qu’il n’arrive pas à dormir : ce type a un problème, il faut qu’il consulte. »

 

La récompense sera à la hauteur de l’effort et Clara ne sera plus la même.

 

« Ils ne sont pas nombreux, ceux qui se réinventent. On prend généralement pour argent comptant version de la réalité qu’on nous présente en premier, on s’abstient de la questionner par manque d’audace, parce que c’est plus facile, plus confortable et, ce faisant, on vit la vie imparfaite et frustrante de quelqu’un qui ne nous ressemble que de loin. Elle (Clara) a peu de certitudes, de moins en moins à vrai dire, mais elle a celle-ci : on ne se rend pas compte à quel point notre destin est façonné par les autres. »

 

Stéphane Carlier, Clara lit Proust, Gallimard, 2022

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