Un jour, un passant, par inadvertance, jeta un gobelet par
terre. C’était un simple gobelet de plastique marron, un gobelet utilisé pour
boire de l’eau ou du café. Il y avait bien sûr des poubelles à proximité (à 3
mètres de là), mais c’était peut-être pour lui un voyage sans fin qui l’aurait
détourné de sa route.
D’ailleurs, je dis « un passant », mais c’était
peut-être une femme, un enfant, un vieillard, un homme d’affaires pressé, un
touriste… qui sais-je encore ? Et puis ce gobelet n’a peut-être pas été
jeté volontairement. Il peut être tombé malencontreusement, malicieusement,
involontairement, par mégarde. Il peut aussi avoir été lancé vigoureusement,
exprès, volontairement. Il est peut-être tombé d’une fenêtre de l’immeuble qui
le jouxte, échappé d’un sac poubelle, d’un sac à main, d’un cartable… Qu’est-ce
que cela change ?
Beaucoup, parce que cela semble un gobelet magique :
voyez la quantité d’eau qui s’en est échappé. Il aurait fallu des dizaines de
gobelet pour contenir ce volume, que dis-je un seau. D’ailleurs, peut-être
est-ce plus : combien de litres d’eau se sont évaporés ? Peut-être
que le gobelet continue de cracher de l’eau et que dans le même temps une même
quantité d’eau s’évapore ?
Ceci peut-il expliquer cela ? Imaginez que vous preniez
un gobelet d’eau et que vous le buviez tout en vous promenant. Imaginez aussi
votre surprise en constatant que vous buvez et qu’il reste toujours autant
d’eau. Pire : vous le renversez volontairement et quand vous remettez à la verticale (dans le bon
sens)… il est toujours plein. Vous paniquez : que faire ? Que
dire ? A qui ? Vous vous dites : si j’en parle à quelqu’un, on
va me prendre pour un fou. Si je le jette, peut-être vais-je être englouti par
les flots ininterrompus : mourir noyé sur une place un jour de grand
soleil, quelle histoire ! Que dira l’officiant religieux lors de mon
enterrement ? Peut-être quelque chose comme « quelle faute a-t-il
commise pour être englouti par les flots ? Cela doit être bien grave ! »
Et mon conjoint maintenant veuf (ou veuve) si on lui demande : « de
quoi est mort votre époux ? », il répondra : « mort noyé
sur la terre ferme au milieu d’une grande place sans bassin par jour de grand
soleil ! » C’est l’internement assuré, la honte, l’opprobre, la
vindicte publique. ;. Un scandale politique immense. En pleine période de
réchauffement climatique, un homme meurt noyé en tombant dans l’eau de son
gobelet ; Non seulement, il n’y a plus de saison, mais le soleil
maintenant provoque des inondations. C’est la fin des temps. On a vu des
gouvernements chuter pour moins que cela ! Les religieux parleront de
l’arrivée du messie, de la résurrection du Christ, de la réincarnation de
Bouddha…
Pendant ce temps-là, des passants déambulent et contournent
la flaque d’eau sans se douter du drame potentiel et du risque représenté.
Oubliez, Fukushima ! C’est « has been » à côté de cette
inondation.
Et puis, un agent d’entretien a ramassé le gobelet et l’a
jeté sans précaution dans son grand sac jaune. Que s’est-il passé
ensuite ? Le sac jaune s’est-il rempli d’eau ? L’effet s’est-il
arrêté ? L’agent s’est-il noyé ? J’ ai
surveillé la presse. Je n’ai rien noté si ce n’est qu’entreprise de nettoyage
(celle qui nettoie cette place et emploie l’agent d’entretien) est en
difficulté financière : y a-t-il un lien de cause à effet ?