samedi 22 novembre 2008

Chronique de Paris et du réchauffement climatique (série 1)


Paris, 18 novembre 2048


Vous venez de recevoir un courrier de la ville de Paris. Votre palmier 991 QL 75 situé devant votre immeuble n’a pas été arrosé depuis une semaine. Il est vrai que maintenant, avec la saison sèche qui s’étale d'avril à décembre, chaque habitant est responsable de l’arrosage d’un arbre dans Paris. L’équation est simple : 5 millions d’habitants = 5 millions d’arbre. Les arbres sont numérotés et identifiés. Il est clair que c’est le vôtre. Vous pouvez toujours écrire et rétorquer que vous étiez en déplacement et que vous en aviez confié la tâche à votre voisine, qu’elle est malade et que c’est pourquoi, etc. Cela ne suffit pas. Quand il fait 37°5 en moyenne et que l’eau est rare, chacun est responsable devant les autres.


C’est vrai que depuis quelques années, le réchauffement climatique est une réalité. Vous vous rappelez vos jeunes années, il y a quarante ans, quand Paris Plage en été fonctionnait un jour sur deux entre deux pluies, quand le mois de Novembre annonçait les frimas de l’hiver. Maintenant, il n’y a plus de Paris Plage : la mer est à Mantes la Jolie, à une demi-heure par train. A quoi bon se baigner dans la Seine ? De toute façon, le niveau a baissé. Les climatologistes promettent que dans 50 ans, vos enfants pourront par endroit la traverser à pied.


L’hiver dure trois mois, de décembre à mars. Et encore ! La température tombe à 19° lors de la nuit la plus froide. Quand la pluie tombe, c’est la fête ! Tout le monde sort dans la rue et danse. Il y a même de nombreux petits malins qui amènent leur shampooing et leur gel douche et en profitent pour se laver. Il n’y a pas de petites économiques. Quand l’eau est 47,5 euros le litre (en euros 2008 = 1, 20 euros), il faut en profiter. Ceux qui recherchent la chaleur descendent sur la Côte d’Azur : la température est alors de 30° (pour 45° en été, la nuit…)


En été, la chaleur devient étouffante : les plus fortunés partent respirer dans leur résidence secondaire au Danemark où il fait seulement 25° ou bien encore, pour les plus riches au Zaïre : l’Equateur bénéficie encore de bonnes pluies et d’une température correcte.


La vie reste agréable. Dès que vous sortez de votre appartement climatisé, un sas vous permet de vous adapter à la température de la rue. Vous mettez alors votre masque à oxygène et vous partez à vos rendez-vous. C’est d’ailleurs la seule bonne raison de sortir parce que vous travaillez le plus souvent en télétravail (vous faites d’ailleurs nombre de rendez vous par vidéo). La nourriture est chère, puisque les pommes de terre viennent de Sibérie par exemple. Heureusement la journée de travail est limitée à 4 heures. Un bandeau sur votre bras permet aux policiers de surveiller (à distance par caméra) si vous êtes autorisés à sortir à cette heure-là. Il y a ceux du matin, ceux du midi, de l‘après-midi… (Les malins se débrouillent entre eux pour se prêter leurs bandeaux). Il est vrai qu’avec 27 millions d'habitants dans l'agglomération parisienne , si tout le monde sortait en même temps…


Pour les sorties du soir et du weekend (il commence le jeudi soir), le même badge vous permet de sortir six heures de suite. Malheur à ceux qui n’ont pas le même badge de couleur que leur conjoint ! Ils doivent sortir séparément (les bandeaux vous sont donnés à la naissance). Cela devient rare : les gens finissent par se marier entre bandeaux de même couleur. Cela donne néanmoins le prétexte à des histoires romantiques : un anglais a écrit une belle histoire autour de l’amour tragique de Roméo (bandeau bleu) et de Juliette (bandeau rouge).


La prochaine fois je vous parlerai des transports et du logement.

samedi 15 novembre 2008

On a marché sur la Somme


Lettre ouverte à l'Ambassadeur de Chine et aux médias

Monsieur l'Ambassadeur, mesdames, mesdemoiselles et messieurs les journalistes, vous avez célébré il y a quelques semaines la sortie dans l'espace des Taïgonautes chinois. Bel événement, magnifique réussite et vous avez eu raison de le faire.

Dans le même temps, un autre évènement étonnant, magnifique, palpitant, fantastique, surprenant ..(et j'en passe) se produisait à Amiens : on a marché sur la Somme. Un jeune picard, dont je tairais le nom par discrétion s'est lancé dans la folle aventure.

Un entraînement de haut niveau

Il lui a fallu de nombreuses années d'entraînement. Il a commencé d'abord au dessus de flaques d'eau, puis progressivement sur des ruisselets, des rus, des ruisseaux avant de pouvoir traverser un premier fleuve : la Veule. . Une préparation physique à base de marche à pied, de vélo et de voiture (pour ne pas se fatiguer) lui a donné le tonus. Vous complétez cela par une alimentation saine, à base de ficelle picarde, de maroilles, de tuiles, de macarons et de battus … bref, tout ce qu'il faut pour rester léger, souple et dynamique.

Même pas mouillé

L'évènement a eu lieu le 25 septembre, en plein quartier Saint Leu. La ville était en fête pour cet évènement et les maisons décorées. La traversée du fleuve qui aurait pu lui prendre deux ou trois minutes a en fait duré un bon quart d'heure, le héros du jour prenant le temps de s'arrêter, de se retourner, de saluer la foule. Accueilli à son arrivée par les notables locaux, il a été fêté comme il se doit. Nous avons pu recueillir ses premières impressions :

"Je tiens à remercier tout d'abord mes sponsors pour le soutien matériel et moral qu'ils m'ont apporté. Je citerai particulièrement Schaetjens, Trogneux, les Pompes funèbres et Désérable pour le montant de leur contribution. C''est grâce à un savant dosage de genièvre, de ficelle picarde et de maroilles que je peux accomplir cet exploit et me sentir tout léger.

Je me demande d'ailleurs comment mon prédecesseur, un Galiléen dont on a perdu le nom, a pu le faire sans ces précieux aliments.. Que dire de ma traversée ? Au plaisir du premier contact avec l'eau succède la joie de marcher, planer, voler au dessus de l'eau. Grâce à mes chaussures sur coussins d'eau, des "Nick water", mes pieds restent au sec.

Mes projets d'avenir : traverser la Manche, ouvrir une école de marcheurs sur l'eau, en faire une discipline olympique…Oui, je crois que j'ai ouvert la voie à d'autres. En Picardie, nous n'avons pas de pétrole, mais nous avons du talent ! Je suis étonné sur le silence médiatique sur cette grande région."

Je terminerai cette lettre en adressant un message à tous les sponsors, mécènes et soutiens qui peuvent aider ce jeune picard. Voici un investissement rentable.

dimanche 9 novembre 2008

L'esprit de participation


- Monsieur Gervais Gagné, vous êtes l'un des représentants du Quebec pour le Comité Olympique. De passage à Paris, merci de nous accorder quelques minutes pour venir parler à notre micro, celui de Radio Sport, la radio leader sur le segment des sportifs de 37,5 à 39 ans.
- C'est un honneur pour moi de parler ici. Je tiens à préciser que je m'occupe du sport à moyen et bas niveau.
- Ma première question porte sur l'excellence des résultats du Canada aux derniers JO. Comment un pays si peu peuplé peut faire aussi bien ?
- L'esprit sportif est très développé dans notre belle province et nous faisons tout pour l'encourager.
- Donnez-nous quelques exemples.
- Par exemple nous faisons tout pour que les gens courent toute la journée : lorsqu'ils vont à leur travail, pendant la journée et quand ils en reviennent. Nous créons des conditions qui les mettent en compétition, par exemple pour arriver ou rentrer à l'heure. Nous sommes soutenus par de nombreux employeurs sponsors de l'opération qui mettent la pression sur les horaires.
- Est-ce que cela ne relève pas seulement de la course automobile ?
- Pas seulement. Les distances du parc de stationnement au bureau se sont accrues. Les ascenseurs sont plus souvent arrêtés qu'auparavant. Bref, quand le matin vous devez courir 500 mètres puis grimper quatre à quatre six étages, vous démarrez bien la journée. Il en est de même le soir. Un goulot d'étranglement à la sortie incite à la course pour partir au plus vite.
- Un autre exemple ?
- Nous avons un programme spécial "femme" : les crèches sont maintenant en étage, sans ascenseur, avec un stationnement difficile à proximité. Ce programme fait suite au projet "Poste" qui marche très bien.
- Qu'est-ce que le projet "Poste"
- Le ministère du revenu, sponsor de l'opération, envoie régulièrement (2 à 3 fois / an) des demandes d'information aux citoyens de l'âge d'or (vous les appelez chez vous les seniors) avec demande de réponse sous 24 heures sous peine d'une surtaxe de 10%. La Poste, deuxième sponsor, limite dans le même temps ses horaires d'ouverture. Résultat : lorsque la campagne est annoncée dans les médias, les citoyens concernés attendent le courrier en survêtement, le remplissent et courent à la Poste.
- C'est bon pour la santé ?
- Les médecins ont constaté une baisse des accidents cardiaques et une meilleure tonicité chez leurs patients.
- Fantastique ! Prochain projet ?
- Nous allons lancer un programme sur la course rapide. Nous avons mis en place des chronomètres sur le temps optimal pour traverser les rues. Les piétons ont aujourd'hui entre 15 et 30" pour traverser la chaussée. Nous allons progressivement réduire ce temps.
- Jusqu'où allez-vous faire cela ?
- Quand plus de la moitié des piétons n'arrivera pas à temps de l'autre côté, nous suspendrons le temps.
- Le gain attendu ?
- Des gens sains dans un corps sain. Un esprit sportif à tout instant et une envie de réussir.
- Monsieur Gervais Gagné, je vous remercie et vous souhaite bonne chance avec votre programme.

samedi 1 novembre 2008

Je suis une troupe de théâtre à moi tout seul


Je suis pour vous un comédien, un saltimbanque, un tragédien, un comique, …que sais-je encore ! Je suis un artiste, vous l'aurez compris., mais pas un artiste comme les autres. L'artiste "habituel", lui, il prépare et répète son rôle, s'entraîne et, au moment de la représentation, il se concentre et se lance en scène en donnant le meilleur de lui-même pour son plaisir et se celui des spectateurs.

Puis, la représentation terminée, après les acclamations et les rappels, il se réfugie dans sa loge, fourbu, épuisé, mais heureux.

Moi, je suis un comédien d'un autre style. Je prépare la scène et la salle, j'accueille les spectateurs, vérifie s'ils ont le bon billet pour la même salle, les installe, décore la scène, vérifie les éclairages et le son, mets en place les affiches.

Une fois que les spectateurs sont (quasiment) tous là, je débute la représentation, joue en même temps les monsieur Loyal et l'Auguste et fais participer les spectateurs. Le show est lancé. A l'entracte, j'ouvre le bar, les rafraîchissements et lance rapidement la sonnerie de fin de pause.

Mon spectacle peut durer une heure ou une journée, deux jours, trois jours…Il peut être en un seul temps ou en plusieurs moments espacés dans le temps. A chaque fois, je vais devoir monter la scène, gérer les spectateurs, puis une fois le spectacle fini, démonter le tout et ranger les décors.

Si mon spectacle est en plusieurs temps, il faut réintégrer les spectateurs dans le lieu, le temps et le moment où nous nous sommes arrêtés. Bien plus, l'inclusion de mon public dans mon spectacle fait que ceux-ci le font varier d'un jour à l'autre. Il ne me suffit pas de répéter le même texte. Il faut improviser, s'adapter en permanence, tout en gérant les impatients, les bavards, les endormis, les passionnés…

Je suis une troupe de théâtre à moi tout seul. Que dis-je une troupe de théâtre ? Une entreprise de théâtre, parce que je transporte mes décors, le matériel. Il n'y a peut-être que les chaises et les murs qui restent sur place.

Je me rappelle avoir invité une troupe de vrais comédiens ambulants venir donner un spectacle dans une ville où je résidais. C'étaient des belges. Ils étaient bien organisés. Ils arrivèrent dans un grand autocar avec quelques sièges allongeables et un vaste emplacement pour leur matériel. Ils nous demandèrent quelques volontaires pour décharger, installer et remballer leur matériel. Les sièges confortables permettaient aux artistes de se reposer et de se détendre avant et après. Quels professionnels ! Moi, c'est plus prosaïque : je reprends le métro, le bus ou le train avec tout mon matériel et mon savoir. Parfois la voiture, c'est plus confortable, mais pas plus reposant.

Et pourtant, j'aime mon métier, son côté renouvelé tous les jours, les petits malheurs et les grandes joies qu'il me procure. Je suis une troupe de théâtre à moi tout seul ! Qui suis-je ? Un formateur, tout simplement. .