mardi 28 juillet 2020

La fée sans pouvoirs

Par un bel après-midi d’été un petit lutin malin se baladait tout près d’une forêt enchantée. Il souriait à la vie en écoutant les oiseaux chantés, lorsqu’il entendit un gémissement. C’était Félicia, une petite fée, qui pleurait à chaudes larmes. Il s’approcha :
- « Mais pourquoi pleures-tu petite fée ? », demanda-t-il.
- « Je suis désespérée, j’ai perdue tous mes pouvoirs magiques », dit la Félicia en sanglotant.
- « Comment est-ce arrivé ? »
- « Je n’en sais rien, en fait, ce matin un Troll m’a demandé d’exhausser l’un de ses vœux et je n’ai pas pu le réaliser ».
- « Et quel était ce vœu ? », dit le lutin.
- Il voulait devenir le Troll le plus puissant et le plus riche de la montagne noire, et au moment d’exhausser son vœu rien ne s’est passé », dit la petite se mettant à pleurer de plus belle.
- « Ne t’inquiète pas petite Fée. Tu as de la chance, nous sommes à l’orée de la Forêt enchantée. On dit qu’une balade dans ces bois éclaire les esprits. Nous allons y entrer et essayer de trouver pourquoi tu as perdu tes pouvoirs. »

Félicia et le lutin malin entrèrent dans la forêt. Après quelques minutes de marches, ils furent interpellés par des craquements et une voix très grave.
- « Bonjour les amis », dit un grand chêne.
- « Bonjour Monsieur le chêne », répondirent-ils.
- « Que faites-vous ici ? »
- « Je suis à la recherche de mes pouvoirs », dit timidement Félicia.
- « Pour trouver tes pouvoirs tu dois savoir d’où tu viens? » dit le grand chêne avant de redevenir un simple bout de bois.
Les deux amis restèrent un moment sans parler et puis le lutin malin demanda :
- « Eh bien Félicia ! Répond à la question. D’où viens-tu ? »
Félicia commença doucement :
- « Je viens des plaines dorées situées de l’autre côté de la montagne noire. Là d’où je viens les gens s’entraident, nous partageons nos biens, nous vivons en communauté. Mes parents sont des êtres formidables qui m’ont donné tout l’amour dont j’avais besoin. »

Ils marchaient en direction d’un lac où ils s’arrêtèrent pour continuer la conversation.
- « Tu as énormément de chance, Félicia d’avoir eu une vie si remplie d’amour », dit le lutin.
- « Oui tu as bien raison », dit une voix venue du fond du lac.
- « Mais qui est-ce? », s’étonna Félicia.
- « C’est moi la dame du Lac. »
Les deux amis se penchèrent au-dessus de l’eau et virent un visage qui leur souriait.
- « Bonjour les amis, que faites-vous ici ? »
- « Je suis à la recherche de mes pouvoirs », répéta Félicia.
- « Pour trouver tes pouvoirs tu dois savoir qui tu es? » dit la voix du lac.

Félicia qui regardait toujours le fond du lac vit peu à peu le visage de la dame disparaître pour laisser place à sa propre image. Le lutin malin qui prenait plaisir à connaître sa jeune amie, lui demanda :
- « C’est vrai qui es-tu ? »
- « Je suis une fée qui en temps normal a des pouvoirs magiques. »
- « Oui mais encore, Félicia, qu’est ce qui te caractérise, quelles sont tes qualités et tes défauts », demanda le lutin.
- « Je suis prévenante, j’aime bien rendre service, aider les gens les rendre heureux. Je manque parfois de confiance en moi »
Ils arrivaient à la sortie du bois, Félicia découragée dit : « Nous voilà à la sortie du bois et je n’ai toujours pas retrouvés mes pouvoirs.

A ce moment le vent souffla :
- « Que cherches-tu ? Pour trouver la réponse écoute ton cœur. »
Le lutin malin, lui dit :
- « Répond à la question que te souffle le vent. »
- « Je chercher à retrouver mes pouvoirs. »
- « Mais pourquoi les cherches-tu ? », insista le lutin malin.
- « Pour pouvoir aider les gens … »
- « Eh bien voilà, jolie Félicia, je crois moi que tu n’as pas perdu tes pouvoirs qu’ils ont toujours été en toi ! »
- « Ah bon mais comment se fait-il, que je n’ai pas pu aider le troll alors ? »
- « N’as-tu pas compris chère fée, Ton don dois servir à aider les autres à leur apporter bonheur et amour. Le Troll n’avait tout simplement pas besoin de toute cette puissance et de tout cet argent. »
- « Je te remercie, mon cher lutin malin, sans toi, je n’aurais pas compris. Tu sais petit lutin, toi aussi tu as un don, tu m’as aidé à retrouver mes pouvoirs magiques.
Les nouveaux amis sortirent de la forêt main dans la main, ils savaient maintenant que l’essentiel était de croire en soi pour que tout deviennent possible.

Source : www.contes.biz

mercredi 15 juillet 2020

la petite fille qui avait des rêves de bonheur


Il y a comme cela de par le monde des petites filles douées pour le bonheur. D'abord, elle était née un soir d'été, alors que dans le ciel éclataient les premiers feux d'artifice de la fête de la Liberté. Par la suite, sa peau se gorgeait de soleil dès qu'apparaissaient les premiers rayons et ces couleurs de miel ou de pain bis dont elle se revêtait la rendaient éclatante de joie. Par la suite son visage s'illumina avec une belle rangée de dents dites "de la chance" et chacun s'amusait de ses fossettes rieuses. Oui, elle était très attirée par le bonheur.

Mais autour d'elle, on lui disait, on lui montrait comment il fallait souffrir, travailler ou se sacrifier avant de goûter au bonheur. On lui avait même laissé croire qu'il valait mieux inscrire dans son corps quelques marques ou cicatrices révélatrices de sacrifices notoires, pour mériter plus tard un peu de bonheur.

Comme elle n'avait aucun goût ni pour les souffrances, ni pour les sacrifices, et qu'elle aimait rire dans le soleil, s'amuser, se réchauffer auprès d'amis, elle se trouva vite en conflit et rapidement elle préféra renoncer à son rêve de bonheur, n'y  plus penser plutôt que de le détériorer ainsi. Elle le cacha au fond d'une malle. Très vite, le rêve perdit de son éclat et de sa vivacité, puis elle l'oublia.

La petite fille, devenue grande, poursuivit des études, se maria et eut beaucoup d'enfants... tout ce qu'il faut pour que comme dans les contes, on puisse accéder au bonheur.

Nulle ombre de bonheur ne vint effleurer sa vie. Elle vécut ainsi, avec économie dans la persévérance, la peine, les obligations et les devoirs. Peu à peu son sourire lui-même se figea sur son visage. Il lui arriva même de rabrouer ceux ou celles qui se permettaient de rire un peu trop bruyamment. Chaque jour elle s'efforça de tenir convenablement le rôle qu'on lui avait appris.

Pour cela, elle veillait à ce que chacun, autour d'elle, reçoive son comptant de bonheur. Cela, c'était permis et même recommandé, mais pas plus ! Quelques fois, cependant, elle percevait qu'en elle vibrait des désirs argentés, elle vivait des tiraillements, des petits pincements au cœur, mais elle ne connaissait pas d'autres façons de faire.

Un jour, alors qu'elle était devenue vieille, que ses enfants étaient partis, qu'elle pensait avoir accompli sa tâche, son rêve d'enfant lui toucha doucement le front. 
Elle retrouva le coffre où elle avait enfoui son rêve de bonheur, le retourna en tous sens. Elle en sortit les vieilles souffrances accumulées, les rancœurs, les abnégations, les interdictions, quelques travaux, mis de côté pour les jours où elle manquerait d'ouvrage. 

Elle retrouva même les recommandations... Les conseils de ses vieux maîtres en éducation qui lui avaient enseigné tout ce qu'elle devait retenir et modifier dans son attitude pour parvenir à vivre des relations harmonieuses.

Elle écarta tout cela, d'abord avec lenteur, puis rejeta le tout. Cela lui coûtait beaucoup de se séparer de ces vieilles choses, mais elle avait besoin d'aérer sa vie.

Tout au fond du coffre, bien à plat, bien rangé, elle vit son rêve de bonheur, toujours aussi soyeux et joyeux. Il n'avait pas pris une ride, peut-être même lui apparut-il plus beau encore.

Elle s'en saisit et le serra très fort sur son cœur, elle sentit que tout au fond d'elle, elle ne l'avait pas quitté mais qu'il lui avait terriblement manqué. Elle décida de ne plus s'en séparer. 

Elle a aujourd'hui libéré ses éclats de rire. Elle sait accepter, avec chaque fois le même émerveillement, les plaisirs qui sont bons pour elle. Elle sait aussi s'éloigner des contraintes qui lui rappellent les efforts d'antan. Elle redécouvre précieux son besoin de bonheur, de cadeaux colorés à recevoir, à entretenir.

Ceux qui l'approchent la perçoivent chaleureuse, rayonnante, authentique. Certains s'en éloignent, sceptiques, mais d'autres se mettent à leur tour à rêver de bonheur.
Aujourd'hui, elle ne propose plus de recette, elle invite chacun à retrouver en lui-même ce très vieux rêve enfoui."

Conte de Jacques Salomé

mercredi 8 juillet 2020

Eugenia : un plaidoyer contre le racisme et l’antisémitisme


Lionel Duroy a écrit un livre sur un grand écrivain roumain, Mihail Sebastian, au travers des yeux de son amie Eugenia. Ici, en 1935, l'écrivain juif roumain Mihail Sebastian donne une conférence à l'université de Jassy, capitale culturelle, riche, cosmopolite et raffinée, de la Roumanie. Le texte ci-dessous est l’introduction de la professeur de littérature qui l’a invité : 


« Si le livre de monsieur Sébastian m’a troublée, s’est enfin décidée Irina Costinas, c’est qu’il nous incite pour la première fois à penser les choses différemment. Comment nier à monsieur Sébastian, qui est né sur notre sol, qui a grandi sur notre sol, qui partage notre langue et notre culture, la qualité de Roumain ? Et si nous le reconnaissons Roumain à part entière, comment ne pas nous interroger sur l’origine de notre animosité à l’égard du juif qu’il n’en demeure pas moins ? Qui rejetons-nous quand nous rejetons Iosif Hechter (= vrai nom de l’auteur). (...) Je m’interroge, et je souhaiterais que nous nous interrogions tous ensemble durant le débat qui suivra son exposé. Ne serait-ce pas une part de nous-mêmes que nous lui prêtons malgré lui ? Comme si, au fil des siècles, nous avions pris par habitude de porter au crédit des juifs, tout ce que nous n’aimons pas en nous, tout ce que nous voudrions détruire en nous. Comme s’il nous avait fallu désigner un bouc émissaire pour, en quelque sorte, nous délester de notre part sombre. » 

mercredi 1 juillet 2020

Le lion malade

Il était une fois un lion, un hérisson et un loup. Un jour, le lion tombe malade. Comme il est alité, des rumeurs inquiétantes circulent au sujet de sa santé. C’est pourquoi le hérisson propose au loup d’aller ensemble rendre une visite de courtoisie au lion et s’enquérir de son état de santé.
Arrivés au seuil de la maison, le loup décide d’entrer le premier chez sa majesté le lion. 
Par peur, par complaisance ou par imprudence, il improvise une recette médicale susceptible de guérir le maître : 
- Si vous buvez du sang de hérisson, vous serez guéri de votre maladie, bafouille-t-il. 
- Mais où vais-je trouver un hérisson ? demande le lion d’une voix fatiguée. 
- Il y en a un là, juste derrière la porte, s’empresse de répondre le loup.
Le lion fait entrer le hérisson, le remercie de s’être proposé pour lui venir en aide et loue l’altruisme et le courage dont il fait preuve en acceptant de se sacrifier pour la bonne cause. Et il ajoute : « Le loup m’a dit que ton sang est le remède de ma maladie ». 
- C’est vrai, mon ami a raison, voici un peu de mon sang. Mais ce sang doit être mélangé avec la cervelle d’un loup pour être efficace. C’est d’ailleurs la raison pour laquelle nous sommes venus ensemble. 
- Mais où vais-je trouver le loup, il vient de partir ?
Le hérisson le rassure sur un ton calme : « il est encore derrière la porte, il attend votre décision ; c’est l’un de vos plus fidèles serviteurs et n’hésitera sûrement pas à vous rendre service ». Le lion appelle le loup et lui demande de revenir. Il s’adresse à lui : 
- Voici le sang du hérisson, mais il me semble qu’il doit être mélangé avec ta cervelle. Sur ce, le lion, impatient de retrouver ses forces, se jette sur le loup et le dévore. 


Source : http://www.contes.biz/