vendredi 22 février 2019

Conte zen : A qui appartient le cadeau ?


Un illustre samouraï, bouddhiste zen pratiquant, d’un âge déjà avancé, vivait près de Tokyo et enseignait ses principes aux jeunes des environs. On disait de lui qu’il pouvait encore affronter n’importe quel adversaire dans un combat à l’épée et remporter la victoire malgré son âge. 

Un après-midi, un guerrier vint le voir, un jeune homme connu pour n’avoir aucun scrupule. 
Sa stratégie consistait à insulter son adversaire, attendre qu’il réagisse, pour ensuite contre-attaquer avec une rapidité dévastatrice. 

Ce jeune guerrier n’avait jamais perdu un seul combat. Il avait entendu du célèbre vieux samouraï et voulait accroître sa réputation en battant le vieil homme. Il défia le samouraï, lequel accepta de relever le défi, contre l’avis de ses élèves. 

Ils se rendirent sur la grande place de la ville. Le jeune guerrier commença à insulter le vieux maître. Il lui lança des cailloux, lui cracha au visage et insulta même ses ancêtres. Plusieurs heures durant, il fit absolument tout son possible pour le faire riposter, mais le samouraï resta impassible. Vers la fin de l’après-midi, le guerrier, qui s’était montré si agressif, était humilié et épuisé. Il partit. 

Les élèves du maître, surpris et déçus qu’il se fut laissé insulter de cette manière, lui demandèrent : 
« Comment avez-vous pu le tolérer ? Alors que vous saviez que vous risquiez de perdre, pourquoi n’avez-vous pas dégainé votre épée ? Vous avez agi comme un lâche. »
Le samouraï leur répondit : 
« Si quelqu’un vous offre un cadeau mais que vous le refusez, à qui appartient-il alors ? 
-      A la personne qui l’offre, proposa l’un des étudiants. 

-      Cela s’applique également à la jalousie, la colère et aux insultes, expliqua le maître. Si vous ne les acceptez pas, elles resteront tout simplement avec la personne qui les traîne. »          

vendredi 15 février 2019

Conte zen : Où est votre parapluie ?

Après 10 ans d’apprentissage, Zeno sentit qu’il était temps d’être promu maître zen. 
Par un après-midi pluvieux, il alla voir son maître. 

« Avez-vous laissé votre parapluie et vos chaussures à l’extérieur, lui demanda son maître. 
-Bien sûr. N’est-ce pas ce que fait toute personne civilisée ? répondit Zenno. 
- Où avez-vous mes votre parapluie : à gauche ou à droite de vos chaussures ? 
- Je n’en ai aucune idée, avoua Zenno. 
- Le bouddhisme zen est l’art d’avoir pleinement conscience de tout ce que nous faisons, expliqua le maître. Si vous ne faites pas attention aux détails, cela peut vous gâcher la vie. Un samouraï qui n’inspecte pas chaque jour découvrira, juste au moment où il en a besoin, qu’elle a rouillé dans son fourreau. Un jeune homme qui oublie d’apporter des fleurs à sa bien-aimée la perdra. »

C’est alors que Zenno se rendit compte que, bien qu’il sût tout des techniques zen, il ne les appliquait pas dans sa vie de tous les jours. 

Source : Paulo Coelho, happinez

vendredi 8 février 2019

Apprenez à vous décentrer !

Un jour, le roi Face-de-Miroir décida de réunir tous les savants de son royaume afin qu’ils lui expliquent la vérité de la vie et lui disent le sens de l’existence. Les savants arrivèrent un à un dans le palais, ils s’installèrent dans une grande salle avec leurs livres, leurs papiers, leurs porte-plumes. À la question du roi : « Quelle est la vérité de la vie ? », chacun répondit :
– Moi, je connais la vérité. Écoutez-moi, je vais vous l’expliquer.
Mais tout de suite, il y eut un autre savant pour s’écrier :
– Un instant ! tout ceci n’est que mensonges. Moi, je connais la vérité. Et je vous affirme que…
Alors un autre savant exigea le silence, car lui, il pouvait répondre à la question du roi. Mais personne ne le laissa parler. En fait, chacun criait :
– Je sais ce qui est le vrai et tout le reste est mensonge ! 

Bientôt, ils en vinrent à des insultes, puis chacun essaya de taper sur la tête de son voisin avec ses livres de sagesse. Dans la grande salle du palais régnait un beau tumulte. D’abord le roi s’en étonna puis il s’en amusa. 

Enfin, il alla trouver son ministre et lui dit : 
– Allez dans la ville, rassemblez tous les aveugles de naissance que vous y rencontrerez. Ensuite, conduisez-les jusqu’ici.
C’est ce que fit le ministre et bientôt il amena un groupe d’aveugles. 

Le roi demanda alors qu’on fit venir un éléphant. Quand la bête se tint devant les aveugles, on guida leurs mains vers l’animal et le roi leur demanda : « Dites-moi ce qu’est un éléphant. ». 
Le premier dit : « Moi, je connais la vérité. Un éléphant, c’est un gros serpent très fort et très musclé. » 
Un autre s’écria tout de suite : « Un instant ! tout ceci n’est que mensonge. C’est un tronc d’arbre solide et rugueux. » 
Le troisième exigea le silence en affirmant que c’est une corde fine et lisse. 
Un autre les traita d’incultes et dit sentencieusement : « Un éléphant, c’est une voile chaude et épaisse. » 
Mais pas du tout dit un cinquième : « L’éléphant c’est un bâton froid et lisse. » 
Quand on donna la parole au dernier il jura par tous les dieux qu’un éléphant c’est un grand mur qui palpite.

Et les savants assistèrent à cette scène étonnante : les aveugles de naissance se disputaient, chacun accusant les autres de mensonge et tous affirmant qu’eux seuls connaissaient toute la vérité sur l’éléphant. 

Alors, le roi leur dit : « Vous avez tous dit vrai ! Mais chacun de vous ne détient qu’une part de la vérité. Oui, mon éléphant est fait d’un mur qui palpite, c’est son ventre. Il a quatre troncs d’arbres solides et rugueux, ce sont ses pattes. La corde fine et lisse c’est sa queue. Il a deux grandes voiles chaudes et épaisses, ce sont ses oreilles. Il a deux bâtons froids et lisses, ce sont ses défenses d’ivoire. Le gros serpent très fort et très musclé, c’est sa trompe ! C’est tout cela un éléphant et bien d’autres choses encore ! » 

Et le roi les congédia tous.
 Apprendre que notre manière de penser n’est pas la seule valable est un long apprentissage. Ce conte peut permettre de comprendre l’intérêt de s’ouvrir aux points de vue des autres. Lors de désaccords privés ou professionnels, pensez à ce conte pour rappeler l’importance de se décentrer.

vendredi 1 février 2019

Un poème sur l'écoute (des autres et de soi)...



Voici un poème de Jacques Salomé. Sa lecture me permet (très) souvent de me remettre doucement à ma place et de me remettre en question. 
"Quand je te demande de m’écouter et que tu commences à me donner des conseils, je ne me sens pas entendu.
Quand je te demande de m’écouter et que tu me poses des questions, quand tu argumentes, quand tu tentes de m’expliquer ce que je ressens ou devrais pas ressentir, je me sens agressé.
Quand je te demande de m’écouter et que tu t’empares de ce que je dis pour tenter de résoudre ce que tu crois être mon problème, aussi étrange que cela puisse paraître, je me sens encore plus en perdition.
Quand je te demande ton écoute, je te demande d’être là, au présent, dans cet instant si fragile où je me cherche dans une parole parfois maladroite, inquiétante, injuste ou chaotique. J’ai besoin de ton oreille, de ta tolérance, de ta patience pour me dire au plus difficile ou au plus léger.
Oui simplement m’écouter… sans excuse ou accusation, sans dépossession de ma parole.
Écoute, écoute-moi. Tout ce que je te demande c’est de m’écouter. Au plus proche de moi. Simplement accueillir ce que je tente de te dire, ce que j’essaie de me dire. Ne m’interromps pas dans mon murmure, n’ai pas peur de mes tâtonnements ou de mes imprécations. Mes contradictions comme mes accusations, aussi injustes soient-elles, sont importantes pour moi.
Par ton écoute je tente de dire ma différence, j’essaie de me faire entendre surtout de moi-même. J’accède ainsi à une parole propre, celle dont j’ai longtemps été dépossédé.
Oh non je n’ai pas besoin de conseils. Je peux agir par moi-même et aussi me tromper. Je ne suis pas impuissant, parfois démuni, découragé, hésitant, pas toujours impotent.
Si tu veux faire pour moi, tu contribues à ma peur, tu accentues mon inadéquation et peux être renforce ma dépendance.
Quand je me sens écouté, je peux enfin m’entendre.
Quand je me sens écouté, je peux rentrer en « reliance ». Établir des ponts, des passerelles incertaines entre mon histoire et mes histoires. Relier des événements, des situations, des rencontres ou des émotions pour en faire la trame de mes interrogations. Pour tisser ainsi l’écoute de ma vie.
Oui ton écoute est passionnante. S’il te plaît écoute et entends-moi.
Et si tu veux parler à ton tour, attends juste un instant que je puisse terminer et je t’écouterai à mon tour, mieux, surtout si je me suis senti entendu."