mercredi 21 octobre 2009

Photographie


Je m’appelle Wilhelm Albert Włodzimierz Apolinary de Wąż-Kostrowicki et je suis gardien de square. Ce n’est pas mon vrai métier, mais vu là où je suis, je fais « fonction de ». Le vrai gardien, lui, ne vient ici que quelques heures par jour, voire par semaine. Il a d’autres sites à garder. Alors, comme je suis face à l’entrée, il me demande ma collaboration : « qu’ai-je vu ? Est-ce qu’il s’est passé quelque chose ? La vigne est-elle intacte (eh oui, il y a un des ceps pas loin de moi) ? Dora est-elle toujours là ? »

Il faut que je vous dise que madame Maar (Dora pour les intimes) est ma voisine. Nous discutons tranquillement tous les deux (C’était l’égérie d’un grand peintre et sculpteur : c’est d’ailleurs lui qui a fait mon buste). C’est une personne charmante qui un jour a fait l’objet d’un rapt. Elle a été retrouvé abandonner dans un fossé en banlieue. Depuis, elle est un peu inquiète (et le gardien aussi). Je m’occupe d’elle est garde l’œil ouvert.

C’est une image parce que je ne peux pas fermer les yeux. Pas très pratique pour me reposer, ni quand j’ai le soleil dans les yeux. Bien plus, je ne peux tourner la tête ou regarder de côté. Rien de plus désagréable quand on parle vous dans votre dos.

Parce qu’on parle de moi. Je ne sais trop si c’est pour mes œuvres ou parce que mon buste a été réalisé par un grand artiste. Mon sculpteur, espagnol de naissance est assez jaloux et n’apprécie guère ma proximité avec son ex-amie Dora (même s’il l’a quitté depuis bien longtemps). Tout cela fait beaucoup de commérages. Il faut savoir passer au-dessus.

Pour encore compliquer les choses, le square où je suis s’appelle Laurent Prache. Je ne le connais pas ce monsieur. Il a beau avoir été mon contemporain, je ne pense pas l’avoir croisé. Son grand fait d’armes : « avoir été un député antimaçonnique » disent mes visiteurs. Je ne sais pas ce que cela veut dire. En tout cas, je n’ai rien contre les gens du bâtiment.

Je passe donc mes journées, comme je vous le dis, à surveiller, à échanger avec ma voisine, à poser pour les visiteurs qui veulent me photographier... Il ne me reste plus beaucoup de temps pour écrire des poésies. Tenez, en voici une pour vous, que j’appelle justement « Photographie »

Ton sourire m'attire comme Pourrait m'attirer une fleur Photographie tu es le champignon brun De la forêt Qu'est sa beauté Les blancs y sont Un clair de lune Dans un jardin pacifique Plein d'eaux vives et de jardiniers endiablés Photographie tu es la fumée de l'ardeur Qu'est sa beauté Et il y a en toi Photographie Des tons alanguis On y entend Une mélopée Photographie tu es l'ombre Du Soleil Qu'est sa beauté

Cela vous a plu ? Tant mieux. Une dernière chose : arrêtez d’écorcher mon nom, cela me fait mal aux oreilles. Appelez-moi plus simplement Guillaume, Guillaume Apollinaire. C’est plus simple ? J’en suis fort aise. A bientôt .

samedi 17 octobre 2009

Le mois de l’Art français en Afrique


Ici, en Afrique, le pays est coloré par une nature exubérante, les tenues des femmes sont pleines de couleurs, les maisons sont peintes (parfois simplement par a terre rouge ou ocre), en bref, nous baignons dans la couleur sous le soleil. Pourtant, aujourd’hui, je viens de faire une rencontre qui m’a donné l’impression de vivre dans un univers grisâtre. Ma ville entre dans le mois de l’Art français, un mois où de nombreux artistes français viennent décorer les rues. C’est bien ; c’est un moyen d’ouvrir nos esprits à d’autres formes d’art et de culture et c’est une débauche de formes et de couleurs

Les œuvres d’art sont plus que saisissantes, quoique des fois un peu incompréhensible. Ainsi, me voici sur la photo sur le quai de la gare en train de regarder une œuvre. Qu’est-ce que c’est ? Un homme m’a dit que c’est une femme portant des paniers. Un autre, que c’est une Parisienne. J’avoue que je ne comprends guère. Pas de tête : peut-être porte-t-elle les paniers sur la tête ou a-t-elle les épaules rentrées ? Son corps est maigre : un simple tube. Je préfère les formes arrondies de nos femmes africaines. Ces occidentales, à force de régime, elles n’ont plus que la peau sur les os. Elle est petite : est-ce un enfant ou l’artiste n’a-t-il plus d’argent ? Cela expliquerait mieux sa maigreur. Feraient-ils travailler des enfants en leur faisant porter de grands paniers ? Heureusement, ses paniers sont vides. Cela symbolise-t-il la crise ? Regardez-les : ils flottent au vent. Quel gaspillage : ils sont en plastique ! Ils veulent nous apprendre l’écologie et ils consomment du pétrole.

Quelle vie terne ce doit être dans ces pays occidentaux. Ils pensent faire de l’Art, mais cela est froid et triste. Ils utilisent du métal et des produits chimiques alors que la nature recèle de produits naturels colorés. Ils voient « petit » : quelle mesquinerie ! C’est mono-couleur. Ce vert uniforme aussi me choque. Nous, nous sommes habitués au mélange des couleurs, des sons et des odeurs.

Je vais emmener mes enfants voir cette sculpture pour qu’ils saisissent la grandeur de notre esprit et de notre culture. Pauvres français !

jeudi 8 octobre 2009

Big Sister vous rappelle à l’ordre


« C’est qui, celui-là ? Non, mais vous avez vu comment il est habillé ? On ne devrait pas laisser des gens comme cela circuler ici ! Je vais demander à mes collègues de le suivre. Et s’il revient dans un tel état, gare à lui. Bien sûr, je ne suis pas là pour me faire l’arbitre de la mode, mais quand même !

Moi, mon rôle est de m’assurer que tout va bien. Je remplace en quelque sorte les caméras de vidéosurveillance. Je suis visible, intégrée dans le décor et je regarde. Je suis, en quelque sorte, votre bonne conscience, vous savez le petit ange blanc qui est sur votre épaule droite (pour les droitiers) et je vous protège des mauvaises influences, celles du petit diablotin qui est sur l’autre épaule.

Bien sûr, je suis nouvelle à Paris. Je fais partie d’un test qui a déjà eu lieu dans diverses villes du monde, avec succès. Je regarde, c’est tout, je ne dresse pas de contravention, je n’avertis personne (à la différence de Big Brother), mais je vous susurre à l’oreille : « attention ! Tiens –toi correctement. Pense à toi, à ta famille, à ton entourage. Qu’est-ce qu’on va dire de toi et de nous ? Etc. » Enfin, tout ce que votre mère, grande sœur, grand-mère (et j’en passe)… vous ont répété des années durant avec le peu de succès que l’on sait. Moralité : voyez ce qui se passe dans les écoles où votre gouvernement envisage de donner des primes d’assiduité.

L’opposition a décidé de réagir d’une manière différente en nous postant à des points clés… pour les autres. En effet, « ils » auraient pu nous coller à la sortie des écoles, devant les cafés branchés, les boites de nuit…mais non : ils ont préféré nous reléguer sur une île avec en face de moi une voie rapide. Peut-être qu’ils veulent que les gens s’habituent à nous avant de nous rapprocher des lieux clés. Peut-être aussi qu’ils ne veulent pas trop que nous nous impliquions dans leurs affaires, du style « dites aux gens de ne pas faire ceci ou cela, mais non nous voulons continuer

En attendant, je surveille les piétons de jours et les pigeons. La nuit, je ne préfère pas en parler. Quant aux voitures sur la voie express, je dois faire très attention : un jour, j’ai eu une grosse poussière dans l’œil. J’ai cligné de l’œil et…boum ! Il y a eu un carambolage : sûrement quelqu’un qui n’en croyait pas ses yeux et qui a du freiner. Maintenant, j’attends une accalmie dans la circulation pour le faire.


Bon, ce n’est pas tout cela, j’ai été très contente d’échanger avec vous et je vous souhaite une bonne journée. Au plaisir de vous revoir. »

jeudi 1 octobre 2009

L’orthographe est sauvée !


Devant la dégradation croissante de l’orthographe et de la grammaire parmi les nouvelles générations, de nombreuses initiatives ont été prises tant au niveau des écoles que des universités (ex. Réintroduction des cours de français dans les écoles d’ingénieurs) ou des entreprises (le DIF fait un malheur sur ces sujets).

Pouvons-nous encore sauver l’orthographe ? Certains en doutent et passent déjà à une nouvelle étape. Nous en voulons pour preuve l’initiative de la RATP qui nous convertit à de nouveaux langages.

Prenez par exemple la circulation des trains. Si vous souhaitez aller à Chatou, prenez XUTI ou ZEBU, mais pas ZARA. Pour St Germain, c’est ZARA (une forme de sponsoring déguisée) ou ZEBU : en bref, des mots simples, sans piège d’orthographe. Pour aller de Chatelet à Gentilly, choisissez SVIT ou KNUT, mais surtout pas PAPY !

Devant le succès de la méthode, la RATP est en train de passer à une nouvelle étape : les signes. Vous trouvez en photo un panneau testé à Auber. Les deux premières lignes indiquent les trains pour St Germain. La troisième ligne, ceux pour Cergy. Les traits en vert, les retards. Compliqué ? Pas plus que de savoir si le « h » est aspiré dans un mot ou non. Et puis, nos férus de l’informatique auront tôt fait de nous trouver une solution.

D’ailleurs, avec une population plus âgée et donc avec une moins bonne vue, n’est-ce pas plus facile de reconnaître sa destination habituelle par la longueur des traits. Cela vous surprend ? En fait, vous achetez comme cela dans les supermarchés : c’est le code couleur et la taille du paquet qui vous tape à l’œil, pas le nom. De nombreux distributeurs ont copié les codes couleurs des grandes marques (cf. Un procès entre Unilever et Intermarché il y a quelques années).

Alors, attendez-vous, lors de la prochaine campagne présidentielle, à un féroce débat autour du thème : « nous avons sauvé l’orthographe ! » (Peut-être que ce dernier mot ne s’écrira plus ainsi mais « orthographe ».