Il était une fois un groupe
d’hommes et de femmes qui, désespérés de vivre sur la planète TAIRE où
régnaient l’incommunication, l’incompréhension, la violence et l’injustice,
décidèrent de s’exiler.
Sur cette planète, qui
s’appelait ESPERE, dès leur plus jeune âge, les enfants apprenaient à
communiquer, c’est-à-dire à mettre en commun. Ils apprenaient à demander, à
donner, à recevoir ou à refuser. Sur la planète ESPÈRE, qui avait en elle aussi
une longue histoire de guerres et de destructions sur plusieurs millénaires, on
avait enfin compris que ce qui fait la sève de la vie, ce qui nourrit le
bien-être et l’énergie c’était la qualité des relations qui pouvaient exister
entre les humains.
Il avait fallu l’acharnement et la foi de
plusieurs pionniers pour accepter ce qui était depuis longtemps si masqué, si
voilé, à savoir que tous les habitants étaient à l’origine des infirmes, des
handicapés de la communication. Par exemple, que beaucoup justement ne savaient
pas demander, et donc prendre le risque d’une acceptation ou d’un refus. Mais
qu’ils prenaient, imposaient, culpabilisaient, violentaient pour avoir, pour
obtenir.
Le recevoir était le plus
souvent maltraité. Accueillir, amplifier tout ce qui aurait pu venir de l’autre
était risqué, déconseillé. L’intolérance à la différence orientait le plus
grand nombre vers la pensée unique, les intégrismes ou le politiquement
correct. Les refuser était également l’enjeu de beaucoup d’ambivalences, le
refus était assimilé à l’opposition, au rejet, à la disqualification et non au
positionnement, à l’affirmation positive quand on a la liberté de dire non dans
le respect de soi.
D’autres principes sont
aujourd’hui devenus caducs sur la planète ESPÈRE. Le premier était de parler
sur l’autre, non pas parler à l’autre, mais parler sur lui avec des
injonctions, en lui dictant par exemple ce qu’il devait penser ou ne pas
penser, éprouver ou ne pas éprouver, dire ou ne pas dire, faire ou ne pas
faire.
Un autre principe était de
pratiquer la disqualification ou la dévalorisation. De voir et de mettre en
évidence tout de suite les fautes, les manques, les erreurs et non pas, bien
sûr, de constater, de valoriser les réussites, les acquis ou les succès.
Le chantage, la mise en
dépendance, la manipulation complétaient les principes déjà énoncés pour
maintenir entre les humains un état de malaise, de non-confiance, de doutes,
d’ambivalences et d’antagonismes propices à entretenir méfiances, violences et
désirs de posséder plus. À un moment de l’histoire de cette planète, il y avait
tellement de conflits et de guerres que deux humains sur trois survivaient dans
l’insécurité, la pauvreté et toujours la faim présente.
Ne
croyez pas cependant que tout le monde restait passif ou inactif. Beaucoup se
mobilisaient, les réformes se succédaient, et de plus en plus de gens
n’acceptaient plus les dérives de ce type de société.
Mais comme vous l’avez
remarqué sur notre propre planète, toutes ces actions se faisaient en aval,
dans l’après-coup, il n’y avait aucune réforme en amont.
C’est pourtant ce que
firent, en quelques décennies, ces pionniers, ces éveilleurs de vie de la
planète ESPÈRE quand ils convainquirent des parents, des adultes de descendre
un jour dans la rue pour se mettre en grève de vie sociale.
Comment firent-ils ? Ils
arrêtèrent de travailler, d’acheter, d’utiliser les transports publics et
privés, de regarder la télévision, ils sortirent dans la rue, se rencontrèrent,
échangèrent, s’offrirent ce qu’ils avaient, partagèrent au niveau des besoins
les plus élémentaires. Ils s’apprirent mutuellement le peu qu’ils savaient sur
une autre façon de communiquer et découvrir ensemble le meilleur d’eux-mêmes au
travers du meilleur de l’autre.
La suite n’est pas simple,
les démarches furent complexes, les résistances vives, mais un jour, dans un
des pays de cette planète, on décida d’apprendre la communication à l’école
comme une matière à part entière, au même titre que les autres : s’exprimer,
lire, écrire, compter, créer, communiquer. Et dans ce pays la violence commença
à disparaître, le niveau de la santé physique et psychique augmenta, des hommes
et des femmes découvrirent qu’ils pouvaient s’autoriser à être heureux.
Un jour, les hommes et les
femmes qui continuent de vivre, de survivre, sur la planète TAIRE devenue
invivable, décideront peut-être, non pas de s’exiler et d’aller vivre sur la
planète ESPÈRE, mais plus simplement d’apprendre à communiquer, à échanger, à
partager autrement.
Vous vous demandez peut-être
où est située la planète ESPÈRE dans l’espace ?
Je vais vous faire une
confidence, elle est à inventer dans votre coin d’univers, dans chaque lieu où
il y a de la vie.
Source : https://contesarever.files.wordpress.com adapté d'un conte de Jacques Salomé
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