Au travers de ce livre, l’auteur analyse l’IBET, l’indice de bien-être au travail, un indice mis au point par Victor Waknine. Une occasion d’analyser la valeur d’un tel indice. A-t-il son utilité ? Pour qui ? Que mesure-t-on exactement ? D’autant plus que cela commence mal si on veut trouver une utilité : l’auteur nous rappelle une citation attribuée à Einstein : « Ce qui se compte n’est pas ce qui ce qui compte et ce qui compte n'est comptable ». Alors, à l’heure où les médias nous parlent du bonheur et de la souffrance au travail, de quoi s’agit-il ?
L’auteur revient tout d’abord sur tout le débat politique sur la souffrance et le bien-être au travail, un enjeu qui, à la suite notamment des suicides chez France Telecom, a interpellé politiques, patronat et syndicats. Il en est résulté de nombreux rapports avec, grosso modo, un débat pour savoir si cela doit être pris au sens collectif (à l’entreprise de créer les conditions ad hoc) ou individuel (= satisfaction des besoins individuels de chacun).
Cette deuxième hypothèse (intérêt individuel) n’a pas prévalu : le bien-être n’est pas nécessairement en soi une finalité en soi. Certains font un travail pour des raisons alimentaires et trouvent leur bonheur ailleurs, quand d’autres y trouvent leur intérêt. A contrario, il n’y a aucune raison pour que le travail soit source d’un mal-être.
C’est dans cet esprit qu’a été créé l’IBET. Paradoxalement, et dans l’esprit de la citation ci-dessus, il s’agit d’un indice négatif puis qu’il mesure les taux d’absence que ce soit pour maladie, licenciement, démission… Pourquoi pas ? Cela peut se compter.
C’est là où commence le débat. Il est possible aux employeurs de manipuler l’indice en jouant sur les sources de données. Il est possible aussi aux syndicats d’arguer que ce n’est pas représentatif et que d’autres éléments pourraient être pris en compte. Par exemple, certains salariés peuvent gagner peu, avoir une forte charge de travail, même dans de bonnes conditions et être incapable de mener des actions externes en complément pour y trouver du plaisir. Ils ne sont pas malheureux, mais sont-ils heureux ? Et le salarié dans tout cela ? comment lier aspiration et exigences d’un métier ? Peut-être est-il un baromètre dont il faut juste analyser les fluctuations, sous réserve que les données soient compatibles d’une étude à l’autre.
C’est là où le bât blesse : d’abord l’environnement change vite et les perceptions des salariés peuvent être altérées par des évènements externes. Ensuite, les salariés peuvent simplement manifester leur droit de retrait. Cela va depuis le désengagement, la simple présence jusqu’au suicide sur le lieu de travail. Enfin, tout dépend de l’état d’esprit des décideurs et des choix de l’outil utilisé : est-ce un indicateur vis-à-vis de l’extérieur (une image pour attirer des candidats), un outil RH pour prendre le pouls, un levier de performance, …
C’est peut-être un peu tout cela. Alors faut-il jeter le bébé avec l’eau de bain ? A une époque de grand changement, notamment climatique, de nombreux états et institutions cherchent à créer ou à diffuser des outils pour inciter les organisations, au sens large, à une forme de responsabilité sociale et économique, l’IBET, sous cette forme ou une autre peut être un indicateur.
Un livre bien documenté avec un regret : l’utilisation d’un jargon qui le rend difficile à lire. Exemple : « La santé psychique et sociale de tout individu repose sur son travail d’élucidation du jeu social dans son ensemble et de l’emploi qu’il y occupe, c’est à dire sur une saine distance entre son intimité et sa personne publique ». Qui a compris ?
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