jeudi 24 novembre 2016

La fille de l'éclusier


Il était une fois, il y a bien longtemps de cela, dans un pays extraordinaire, une jeune fille qui vivait au bord d’un grand canal. Elle vivait avec ses parents dans une petite maison toute simple, attenante à une écluse.

Durant son enfance, elle passa ses journées à suivre son père ainsi que les hommes de son équipe, qui géraient tous les mouvements de l’eau, liés à la fermeture, comme à l’ouverture de l’écluse, lors du passage des nombreuses péniches.

Lorsqu’elle eut atteint un certain âge, elle dut partir à la grande ville pour y poursuivre ses études.
Elle entretenait avec son père une correspondance dans laquelle elle retrouvait toutes les sensations agréables de son enfance, liées à l’écoulement paisible et fluide, ainsi qu’au murmure doux et régulier de l’eau, filtrée savamment à travers l’écluse.

Puis un jour, elle dut se rendre chez elle, au chevet de son père qu’un grave accident venait de terrasser.

A peine arrivée, un terrible orage éclata. Toute la pluie du ciel semblait s’abattre sur les environs.
Les bourrasques de vent projetaient violemment la pluie contre la petite maison.

Au fur et à mesure que le déluge s’abattait, la rapide montée des eaux fit naître un sifflement puis un grondement qui s’échappait de l’écluse en saccade. Ce débit inhabituel allié aux conditions environnantes déclencha la panique parmi les hommes de l’équipe.

L’un deux eut l’idée d’ouvrir toutes grandes les vannes avant de s’enfuir. Cette action provoqua une explosion, un vacarme, un tumulte faisant jaillir l’eau sous pression dans une cataracte assourdissante. Dès lors toute parole devenait inaudible, absurde.

Perturbée par le bruit intense et anormal de l’écluse, la jeune femme se rendit calmement sur les lieux. Elle avait acquis auprès de son père qu’elle suivait pas à pas tous les gestes adaptés à chaque circonstance. Avec méthode et calme, elle parvint à réguler progressivement, le flux des eaux qu’elle finit par maîtriser totalement, tandis que la tempête faisait encore rage. Elle réussit ainsi à contenir les eaux de l’amont, qu’elle laissa filer, vers l’aval, dans un flux régulier et calme.

Maintenant l’orage s’éloignait peu à peu, la pluie diminuait jusqu’à finalement cesser, écartant le danger qui pesait.


A nouveau le calme et l’harmonie, s’installaient de part et d’autre de l’écluse qui avait retrouvé un débit naturel et régulier. Alors elle prit conscience que l’homme qui l’avait abandonnée, seule et désespérée, n’avait simplement pas su faire face, à une situation dans laquelle il l’avait plongée.


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