Le conte populaire islandais suit quelques règles. D'abord, celle du
chiffre trois, omniprésent. Tout va par trois, notamment les événements. Il y a
ensuite la notion de métamorphose et surtout une atmosphère non-élégante,
frustre voire naïve. La tonalité d'ensemble des contes est lugubre, voire
sinistre. Il n'existe pas de contes joyeux. Le monde dans lequel évoluent les
héros n'est pas féerique. Il est au contraire très pragmatique. Ce qui peut paraître
paradoxal avec l'idée de surnaturel dans les contes.
Cela peut déjà s'expliquer par les conditions de vie très dures en Islande.
Il s'agit pour les Islandais de compenser la rudesse de leurs vies par le
conte, autrement dit par la transfiguration du réel.
Le surnaturel surgit spontanément et est posé comme acquis, ce qui
contribue à l'atmosphère occulte. Il n'y a pas de frontière entre le monde réel
et le monde irréel. Quand elles interviennent, les créatures surnaturelles le
font normalement.
Un roi et une reine
ont un fils, Sigurður, beau, fort et adroit. Lorsqu'il est en âge de se marier,
son père lui indique un roi étranger, père d'une fille charmante qui serait un
bon parti, et Sigurður part à sa rencontre. Arrivé auprès du roi étranger, il
lui demande la main de sa fille, qui lui est accordée à condition qu'il
séjourne aussi longtemps que possible sur place, car le roi, vieux et malade,
n'est plus vraiment en état de gouverner. Le jeune homme accepte, mais demande
à pouvoir rentrer dans son pays lorsqu'il apprendra la mort de son propre père.
Les noces sont célébrées, et bientôt de cette union naît un fils.
Alors que l'enfant est
dans sa deuxième année, Sigurður apprend la mort de son père et embarque avec
sa femme et son fils pour retourner chez lui. Au bout de quelques jours, le
vent tombe et le navire demeure encalminé. Tandis que Sigurður dort, la reine,
demeurée sur le pont avec son fils, voir approcher une barque qui se révèle
bientôt être de pierre et occupée par une horrible femme troll, qui monte à bord.
Elle lui arrache ses vêtements et les revêt, lui enlève l'enfant et met la
reine dans la barque en lui jetant un sort, pour que jamais sa course ne
s'arrête avant qu'elle n'arrive chez le frère de la femme troll, dans le monde
souterrain.
La femme troll prend
la place de la reine, abusant le roi par son apparence, et lui parle durement.
Sigurður, bien que surpris du changement d'attitude de sa femme, jusque-là
douce et calme, ne détecte pas la supercherie, obéit à ses ordres et fait
mettre la voile vers son pays, le vent s'étant remis à souffler, et le navire
aborde. Cependant l'enfant ne cesse de crier et il faut lui trouver une
nourrice, une femme de la cour qui parvient à l'apaiser. La vie se poursuit
même si le roi trouve son épouse bien changée.
Un jour, une très belle femme vêtue uniquement de
sous-vêtements en lin blanc apparaît devant la nourrice. Elle porte une
ceinture de fer reliée à une chaîne qui s'enfonce sous terre. Elle embrasse
l'enfant, puis le rend à la nourrice, et disparaît par le plancher. Elle
revient le lendemain, tout se passe de la même façon, mais avant de disparaître
elle dit tristement : « Deux sont passés, il n'en reste qu'un ». La nourrice, effrayée, va alors
raconter l'aventure au roi. Celui-ci s'installe le lendemain dans la chambre,
l'épée à la main. La dame apparaît, le roi reconnaît sa femme et tranche la
chaîne, ce qui provoque un terrible grondement sous terre mais libère la reine
de l'enchantement. Ils s'embrassent et la reine raconte au roi comment la femme
troll l'a placée dans la barque, comment elle a traversé une sorte d'obscurité
avant de se retrouver chez un troll à trois têtes qui a voulu coucher avec
elle. Le troll l'avait enfermée dans une pièce en la menaçant de l'y laisser à
jamais à moins qu'elle ne lui cède. Elle avait alors imaginé de lui faire
croire qu'elle lui obéirait, si seulement elle pouvait voir son fils trois
jours de suite, pensant que cela lui fournirait un moyen pour qu'on lui vienne
en aide. Le troll avait accepté, mais lui avait attaché la chaîne à la ceinture
afin qu'elle ne puisse s'échapper. Lorsque Sigurður avait tranché la chaîne, le
troll, qui habitait sous la ville, était tombé dans un gouffre, et c'est son
agonie qui avait provoqué le terrible grondement.
Le roi Sigurður
comprend alors pourquoi sa fausse épouse était devenue si acariâtre : il
la fait lapider, puis écarteler des chevaux sauvages. Le roi marie la nourrice
à un homme de haut rang, et le bonheur revient à la cour.
Source : Wikipedia et La
géante dans la barque de pierre et autres contes d'Islande, collectés par Jón Árnasson, traduit par Ásdís
Magnúsdóttir, José Corti, 2003
Source de cette analyse des contes islandais : http://www.toutelislande.fr/LitteratureIslandeContes.html
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