samedi 9 janvier 2010

La Libellule du train Nantes-Paris


Une petite libellule attirée par un grand insecte brillant inconnu entra par mégarde un jour dans un TGV. Le temps qu’elle réalise que le milieu ne lui convenait guère, les portes s’étaient déjà refermées et elle se trouva pris au piège. Après s’être heurtée vainement plusieurs à la porte, elle décida de chercher son chemin ailleurs.

Elle passa une porte à la suite d’un humain et se retrouva dans un long boyau où le monde était à l’envers. Dans son univers habituel, les humains sont debout, se déplacent et font toutes sortes de sons avec leurs bouches. Ici, ils étaient tous prostrés sur des sièges sans se parler. Ce qui l’étonna le plus dans ce silence, ce fut l’absence d’autres insectes ou autres animaux familiers : mouches, oiseaux…Elle voletait prudemment dans ce tuyau, évitant d’attirer l’attention des humains perdus dans leur pensée. Tout d’un coup elle sursauta à la suite de bruits dans son dos. Elle vit arriver vers elle un grand humain avec un drôle de chapeau et un sac. Il agitait frénétiquement une grande pince. Elle crut sa dernière heure arrivée quand elle réalisa que les humains le calmaient en lui donnant des bouts de feuille à pincer. Cela semblait réussir puisqu’il passa d’un bout de feuille à une autre sans même la voir.

Elle s’amusa à la suivre, passa diverses portes puis arriva dans un tuyau bizarre avec des odeurs de nourriture. Elle réalisa tout à coup qu’elle avait faim. Il n’y avait pas d’insectes à portée de main. Elle se demandait ce qu’elle allait bien pouvoir manger quand elle entendit des bruits bizarres autour d’elle. Elle vit des doigts pointer vers elle : de petits humains venaient de la repérer et cherchait à l’attraper. Heureusement le ciel était assez haut et elle pouvait voler rapidement. Malheureusement, les portes vitrées l’arrêtèrent et les grands humains se mirent de la partie. Ses belles couleurs la faisaient d’autant plus ressortir sur le ciel gris. Elle chercha à se cacher dans la cuisine, mais l’humain présent brandit un grand outil vers elle et elle dut continuer sa quête d’un coin tranquille derrière des gros sacs.

Le voyage dura ainsi des heures, des années, des siècles pour elle jusqu’à ce que le grand insecte brillant dans lequel elle était entrée s’arrête. Elle profita de la cohue pour sortir par un trou d’air et se retrouva dans un immense endroit sombre avec beaucoup de bruit. Elle monta vite dans le ciel pour se repérer et rechercher son étang, ses roseaux habituels et ses amis, mais ne vit que de gros insectes brillants comme celui dans lequel elle venait de circuler et des congénères inconnus.

Une mouche daigna la renseigner et lui dit qu’elle n’était de pas de la bande du coin et qu’elle était en danger si elle restait là. Affolée, elle remonta dans son grand insecte brillant, se cacha du mieux qu’elle put et attendit le départ.

Ayant conscience qu’elle vivait une grande aventure, elle nota tout ce qu’elle voyait pour le raconter à ses amies. Elle nota les humains qui dormaient ou lisaient, ceux qui se bécotaient, les rouspéteurs, le mouvement perpétuel des humains qui circulaient dans le tube et revenaient les bras chargés de victuaille, l’humain à la pince et le roulis du tuyau qui lui donnait le mal de mer. Elle classa ses idées et les organisa en une dizaine d’histoires pour les longues soirées sur les brins d’herbe. Le hasard voulut qu’elle se retrouve à son point de départ et put voleter vers amis.

La joie de les revoir au loin lui monta tellement à la tête qu’elle perdit ses instincts élémentaires de réflexe et ne vit pas l’oiseau fondre sur elle et l’avaler. C’est ainsi que périt une grande exploratrice.

Aucun commentaire: