samedi 23 janvier 2010

Nous sommes dans l’illégalité !

Du moins, il y a de fortes chances pour que nous le soyons. « Nul n’est censé ignorer la loi » dit l’adage latin (« Nemo censetur legem ignorare »).
La lecture, dans le RER d’une affiche vantant les charmes de Shiva en tant que repasseuse, m’a fait découvrir le texte suivant : « dans les conditions posées par l’article sexdecies du CGI ».
Qu’est-ce que sexdecies ? Quelqu’un porté sur le sexe ? Un adjectif ? En tout cas, pas un nom puisqu’il n’y a pas de majuscule. Je me suis précipité sur un dictionnaire où j’ai découvert que sexdecies était… avant septdecies et après quindecies. Cela signifie la seizième partie d’un article d’une loi ou d’un décret. Simple ! Un peu de recherche pour découvrir que la douzième partie se dit en français juridique « duodecies » et la vingtième partie « vicies ». Vous le saviez sûrement, moi pas.

En repartant de l’adage latin cité plus haut, j’ai découvert que j’étais doublement dans l’illégalité : non seulement je ne connais pas cette loi, mais en plus je ne parle pas français, du moins le français juridique (heureusement que je n’ai pas à passer le test de naturalisation).

Alors j’ai décidé d’y remédier : d’abord connaître le droit. J’ai ainsi appris que ce célèbre adage ne signifie pas que tout citoyen est censé connaître l’ensemble des textes législatifs et réglementaires (décrets, circulaires…) existant dans l’ordre juridique français (= 8 000 lois et plus de 110 000 décrets en vigueur). C’est une fiction juridique (sic), c’est-à-dire un principe dont on sait la réalisation impossible, mais qui est nécessaire au fonctionnement de l’ordre juridique (sic) ?????

Comme je n’ai pas compris cette phrase (ni «sexdecies »), je me suis inquiété pour mon niveau de français. Bonne nouvelle, en 1999, le Conseil constitutionnel conscient de ce problème a pris des décisions pour favoriser l’intelligibilité de la loi (notamment au travers d’Internet). Je suis rassuré. L’affiche vue dans le métro doit faire partie de la campagne d’information. Il ne me reste plus qu’à me promener avec un dictionnaire pour (re)apprendre à parler français.

Toutefois, quoique déjà doublement inculte (en loi et en français), il me restait encore à avaler une troisième potion : Shiva n’est qui vous croyez. Shiva, illustrée sur la publicité par une jolie brune repasseuse de son état est en fait un dieu masculin dans la mythologie hindoue. C'est le dieu de la destruction des illusions et de l'ignorance. Il est représenté avec un troisième œil, symbole de sagesse, au milieu du front et avec un cobra autour du cou. Il porte un trident et tient un petit instrument de percussion. Il est assis sur une peau de tigre, symbole de l'énergie potentielle (dixit Wikipédia). Rien à voir.

Moralité : je ne lis plus les affiches dans le métro et je me sens moins profondément ignare.

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