mardi 26 octobre 2021

Conte des iles Samoa


Sina était une très belle princesse des îles Samoa. Elle était alliée à tous les grands chefs de son temps. La réputation de sa beauté s'était d'abord répandue partout dans les îles proches, puis dans les îles Tonga et, au-delà, jusque dans les îles Fidji. 


             Tous les grands chefs de son pays avaient rivalisé d'habileté et de parures pour toucher son cœur mais aucun n'avait réussi à toucher son cœur. 


              Ce furent ensuite ceux des îles Tonga qui se présentèrent. Ils s'essayèrent aux concours de javelots, aux concours de pêche au harpon,  à qui réussirait à soulever la plus grosse pierre. Je crois même que l'on se défia à celui qui plongerait le plus profondément dans le lagon, à celui qui resterait le plus longtemps sous les eaux. Quelques-uns y laissèrent la vie ... Rien n'y fit : Le plus jeune, le plus beau et le plus brave des chefs Tongans ne parvint pas à toucher le cœur de la princesse. 

               Tingilau, fils du grand chef fidjien Tui-Viti décida d'aller voir la princesse. Guidé par deux tortues favorites au service de ses dieux, suivi par une flottille de canots de guerre, Tingilau prit la mer et arriva à Samoa sans difficulté.  Il se présenta devant la belle Sina : beau et brave, gai et éloquent, il gagna le coeur de la princesse . Ce fut pour eux comme si le ciel s'était entrouvert ! Ils annoncèrent leur bonheur... 


             Tous les chefs Samoans, piqués de jalousie, s'opposèrent au départ de la princesse : il n'était pas question qu'elle suivît un chef étranger ! 


Tingilau demanda à son équipage de se préparer à combattre . Mais Sina tempéra sa colère impétueuse en lui disant : 

_ " Je ne peux pas me rendre à ton canot en marchant dans le sang de mes parents ! " 

              Puis, mutine et rusée, elle ajouta :

_ " La lune est ronde et brillante ... Combien d'hommes faudrait-il pour vaincre la résistance d'une femme et de quelques-unes de ses domestiques, si on les trouvait se promenant tranquillement au bord de la mer au clair de cette pleine lune ? "  

             Tingilau garda le silence. Il cherchait dans son esprit quel était le sens du message caché. Il réfléchit longuement puis il dit à la belle Sina qu'il se retirait, avec ses hommes, pour aller boire, comme tous les soirs, la liqueur sacrée du Kawa. 
Sina avait compris : Elle attendit que le temps fût venu d'aller se promener sur la plage au clair de la lune ...

               Autour du bol à Kawa étaient assis Tingilau, fils de Tui-Viti, et ses chefs, choisis parmi les fidèles capitaines de sa flotte. Tingilau, s'adressant à eux, dit : 

            _ ".Cette nuit, quand la marée atteindra les pieux auxquels les canots sont amarrés et que la fraîche brise de terre apportera le sommeil aux jeunes guerriers samoans, que vos voiles soient prêtes et vos pagaies dehors ..."

                  Tingilau  but son kawa, se retourna vers la belle Sina et lui dit à l'oreille: " Je pense qu'un chef, avec l'aide de trois ou quatre guerriers fidèles, pourrait vaincre la résistance d'une jeune princesse et de trois ou quatre de ses suivantes, si elles se promenaient sur le rivage pour voir la marée montante et le coucher de la lune. "

           Avec un petit sourire en coin, Sina susurra à son oreille : " Tingilau, le fils de Tui-Viti, pourrait s'en assurer en en faisant l'essai ... "

                Pendant ce temps, les suivantes de Sina chantèrent des chansons avec un refrain qui répétait à l'envie que jamais aucun chef ne pourrait toucher son coeur ou l'emmener et de leur côté  les compagnons de Tingilau chantèrent des chansons qui plaignaient leur chef: Le coeur répétait à l'envi l'impossibilité de toucher le coeur de Sina et la "nécessité" de retourner aux îles Fidji sans la belle princesse ... Les jeunes Samoans s'endormirent tranquillement. 

              Au moment où le milieu de la nuit était passé, quand la lune fut dans l'ouest, Sina et cinq filles se rendirent sur la plage de sables du rivage. Les flots montants battaient leurs pieds nus. Tingilau était là, avec cinq fidèles compagnons. 

 

La fraîche brise de terre gonfla les voiles de leur bateau et  La belle Sina, dont le coeur n'avait pu être touché par aucun chef des Tonga, partit et s'éloigna sur la mer avec le beau et brave Tingilau, le fils de Tui-Viti 

 

Source :  http://contes-polynesiens-michel-savatier.blogspot.com/2007/08/conte-des-iles-samoa.html

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