mercredi 7 mai 2008

Libérez le "clown" en moi…






Bonjour, je suis mère de famille. Bonjour, je suis responsable de la collecte de fonds pour une grande université au rayonnement international. Bonjour, je suis peintre. Bonjour, je fais de la sculpture. Bonjour, je…

En fait, ce sont mes différentes identités. Alexandre Jardin a écrit récemment un livre intitulé : "chaque femme est un roman". Beau titre, toutefois un peu en dessous de la vérité pour moi. S'il devait écrire sur moi, ce serait un roman à tiroir ou une série de nouvelles ou un kaléidoscope.

Comment devient-on peintre, me demande-t-on parfois ? Bonne question….mal posée. On ne devient pas peintre. Nous sommes peintres et tout notre combat est de pouvoir peintre. Quand vous êtes jeune, l'école et vos parents vous encouragent à dessiner. Mais sitôt passée l'adolescence, la peinture devient un objet honni et honteux. Place aux études sérieuses qui malheureusement laissent peu de place à la concentration et au travail pour progresser en peinture. Puis, c'est le mariage et de ravissants bambins qui adorent faire du dessin et détestent vous laisser en faire (parce que cela prend sur leur temps de câlin). En parallèle, vos différents métiers (successifs ou en parallèle) vous prend le reste du temps (sans oublier le mari, les amis, le chien, l'entretien de la maison, les déménagements…)

La peinture, c'est simple, me diriez-vous : un chevalet, des pinceaux, de la couleur et avant ! Si c'était vrai ! C'est là que tout commence : l'angoisse devant la toile, l'organisation de ses dix mille idées (parce que j'en ai dix mille ou pas du tout), la préparation du travail et au moment où vous êtes prête, la vie familiale, professionnelle, sociale, que sais-je encore, vous ramène à la réalité terre à terre. Vous pouvez continuer demain, me diriez-vous. Il suffit de noter les idées. Ben voyons ! Je vais être un peu crue : c'est comme l'amour. Quand c'est sur commande, cela ne marche pas. La peinture, c'est pareil. La magie passe et revient sous une autre forme quand elle veut.

Mais bon, je ne vais pas me plaindre. Je peins et même de plus en plus...au fur et à mesure que mes enfants grandissent. C'est grâce à eux ou malgré eux. Je ne sais. En tout cas, je peins et ma peinture évolue, mon style s'allège et moi aussi. Je regarde mes peintures d'il y a deux ou trois ans et elles m paraissent lointaines, lointaines. De quoi sera fait demain ? Je ne sais, mais j'y vais. J'y vais pour me faire plaisir, pour faire plaisir à tous ceux qui m'ont fait confiance, à tous ceux que j'aime.

C'est là où le bât blesse. En m'allégeant, je me sens avec une double personnalité : une espèce de Dr Jekyll et Mr Hyde dans le bon sens du terme. Cela me fait un drôle d'effet. En fait, c'est mon aspect "artiste" qui me tire d'un côté, pendant que mon rôle social (au sens large) me retient. J'ai l'impression de libérer le "clown" (ma dimension créatrice) qui est en moi. Je rêve de pouvoir les faire et en même temps j'en ai peur. Ceux qui me connaissent me reconnaîtront-ils ? Moi-même, quel regard vais-je porter sur eux après cela ?

Alors je ruse. Je ruse avec moi-même, je ruse avec les autres, je ruse avec les différentes techniques pour retarder les effets de ma dualité. Pourtant, je le sais au fond de moi-même que je vais continuer, y arriver et atteindre je ne sais quoi. Peut-être d'ailleurs je n'atteindrai pas ce "je ne sais quoi". J'y tendrai vers. C'est d'ailleurs mon rêve. Ne pas l'atteindre pour se dire : "demain, tu peux aller plus loin". Progresser tout le temps, trouver toujours quelque chose de différent, n'est-ce pas cela le vrai regard d'artiste ?

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