dimanche 11 mai 2008

Un cadran optimiste


Je reviens d'une ville appelé Roazhon (dans la langue locale, j'ai bien dit la langue, pas le patois). C'est une ville avec quelques particularités : c'est la plus petite ville du monde qui a un métro (un vrai métro). C'est aussi une ville qui a un indécrottable optimisme. J'en veux preuve le parlement local qui a en son fronton non pas une pendule comme tous les édifices habituels…mais un cadran solaire.

Vous me direz que c'est un pays avec beaucoup de soleil. Pas du tout ! Il y pleut en moyenne 172 jours par an, sans compter les jours de temps gris ou de brouillard. Bref, un cadran solaire pour quelques jours par an. Cela peut être perçu par certains comme une plaisanterie, un gadget, un bref que se sont offerts les édiles. Peut-être…

Pour moi, c'est un signe d'un indéniable optimisme. "Après la pluie, le beau temps" dit le dicton. Rien à voir avec le réchauffement climatique, le parlement porte fièrement son cadran depuis plus de trois siècles.

C'est aussi le signe d'un savoir de vivre. Si les montres aujourd'hui sont partout (à votre poignet, sur votre téléphone mobile…), pendant longtemps, ce fut un objet volumineux ou de riches. Le temps était donné par les églises ou les mairies. Que le parlement donne l'heure par le truchement d'un cadran solaire est le signe clair d'un certain savoir-vivre : comment être à l'heure ou ne pas y être quand la grande majorité du temps, vous ne pouvez pas lire l'heure.
Peut-être avaient-ils (ou ont-ils) d'autres moyens de se donner l'heure : après la troisième pluie de la journée, quand le trottoir sera sec cet après-midi…

Imaginez les réunions au parlement qui doivent commencer à l'heure dite. Qui dit l'heure ? La majorité ou l'opposition ? Bel exemple de consensus politique sur lequel nous devrions prendre exemple.

Et puis, il y a l'effet saison: on plus de chances de savoir l'heure en été qu'en hiver. C'est la vie à l'envers : les habitants devraient être plus laxistes et souples sur le temps en été avec le soleil et la chaleur alors que c'est l'inverse.

En tout cas, je constate que les gens y sont plus détendus qu'à Paris (remarquez que ce n'est pas trop difficile) et plus aimable. Les gens se saluent, les chauffeurs de taxis sont aimables, les passagers dans les bus plus cordiaux… Il règne dans cette ville une bonne humeur du moins les jours où j'y suis passé. Peut-être était-ce le fait de la pluie, parce qu'il a plu énormément durant ces quelques jours. L'absence de cadran solaire et de temps rythmé a sûrement joué un rôle.

Michel Serres, un philosophe a écrit : "Désormais, tout le monde a une montre et personne n'a le temps. Echangez l'un contre l'autre : donnez votre montre et prenez le temps." Il pourrait dire aussi "échangez votre montre contre un cadran solaire".

Alors, à quand une pétition nationale pour le retour au cadran solaire ?

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