samedi 16 février 2008

Mon cher oncle


Je te remercie de m'avoir offert ce beau voyage à Paris. C'est mon premier voyage en France et je suis émerveillé par tout ce que je vois. La ville est belle, cela me change de Marrakech où j'ai toujours vécu. Remarque, la ville est belle, mais je préfère nos compatriotes. Ici les parisiens sont tristes, peu souriants, toujours pressés. Je me fais bousculer à longueur de temps. J'ai l'impression de gêner. Rien à voir avec l'affabilité de nos concitoyens.

Les parisiennes sont étonnantes. Une jeune fille qui m'a arrêté dans la rue pour me faire répondre à une enquête; j'ai accepté pour une fois que quelqu'un me parlait poliment. C'était une drôle d'enquête. Elle m'a demandé ce que je faisais. Quand je lui ai dit que je tenais une libraire, la Fnaque, elle m'a regardé d'un drôle d'air. Elle m'a demandé si j'y étais vendeur; elle a sursauté à l'annonce que j'étais ton associé et bientôt le propriétaire à ta retraite. Elle a continué avec des questions curieuses. Je te mets mes réponses à côté pour que tu me dises si j'ai bien répondu :

- "Etes-vous pour la vente en ligne ?" = "oui, nous n'avons pas le choix avec la taille du magasin. Les clients attendent chacun leur tour. On leur offre le thé en attendant."
- "Est-ce que vous êtes pour le port payant ou le port gratuit des livres ?" = "le port gratuit" (ce ne sont pas les quelques millimes que nous donnons aux gamins qui livrent les clients qui ont de l'importance)
- "Pourtant votre syndicat est pour le port payant ?" = "bien sûr, nous les payons"
- "Que pensez-vous de la politique d'Amar Zhon (je n'ai pas compris son nom) = "moi, je ne fais pas de politique. M. Amar, il peut faire ce qu'il veut"
- "M. Olive Vert (ou Olivennes ?) a écrit un rapport contre le piratage. L'avez-vous lu ?" = "Je n'ai pas le temps de tout lire. En tout cas, je n'aime pas les romans avec les corsaires"
- …

Je l'ai senti devenir de plus en plus nerveuse. Tout d'un coup, elle a arrêté l'entretien, a refermé son bloc, m'a dit qu'elle travaillait pour gagner sa vie et que ce n'était pas gentil de ma part de me moquer d'elle. Sur ce, elle est partie sans me dire au revoir. Je n'ai rien compris.

En tout cas, mon oncle, j'ai découvert combien ta librairie est connue. Toutes les personnes de notre famille que j'ai rencontrées ici connaissent la Fnaque et ont l'habitude d'y aller (Je sais que je travaille depuis peu chez toi, mais je n'ai pourtant pas le sentiment d'avoir vu beaucoup d'entre eux chez toi).

Ton neveu

PS : ne t'inquiètes pas si l'enveloppe est abîmée. En allant poster ce courrier, j'ai du la ré-ouvrir. Il faut que je te dise que tu es copié. Il y avait près de la Poste un magasin qui s'appelait la Fnac. Remarques, rien à voir. Ces français prétentieux ont ouvert un immense magasin sur plusieurs étages. Rien à voir avec notre boutique de 3 m² dans la médina. En tout cas, nous avons l'antériorité pour nous. Il faut que les attaquions en justice. Ce n'est pas beau de leur part de s'approprier un nom célèbre. Tu vois que mon voyage aura servi au moins à quelque chose.

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